Zebulon à Facho Land

Ou quand l'éminence grise et le fou du roi déclare sa flamme à José Bové

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Martinez rêve d'un Front alternational


Qui est Jean-Claude Martinez, député européen et conseiller régional Front national en Languedoc-Roussillon, un des vice-présidents du FN, mirifique conseiller spécial à la prospective stratégique auprès de Le Pen ? « Un mystère politique et humain », témoigne Alain Lipietz député européen Vert, séduit par un homme situé pourtant aux antipodes idéologiques.


Mystérieux, insaisissable, imprévisible, inclassable et provocateur, que fait-il au FN cet homme né à Sète en 1945, fils de combattant républicain Espagnol ayant du fuir la dictature de Franco.
Enfant il cotoya sur les bancs de la communale l'ex maire de Sète et député communiste François Liberti dont il est resté proche, ils ne manquent jamais l'occasion de se faire la bise et d'aller manger un bout ensemble dans un des bistrots du port pour parler du bon vieux temps lorsqu'ils se croisent sur un marché.

Etudiant brillant, universitaire admiré, fiscaliste renommé, essayiste de haut vol, qui fut conseiller et ami personnel d'Hassan II, il a crée et mis en place l'ENA du Maroc, il a rencontré Fidel Castro et Hugo Chavez.
Bénéficiant de nombreux réseaux dans le monde Arabe, il avait organisé à Bagdad la fameuse rencontre entre Saddam Hussein et Le Pen.
Il fit parti du petit cercle restreint des personnalités ayant suivie la dépouille d'Hassan II, marchant juste derrière Bill Clinton et Jacques Chirac.

« C'est un excellent professeur et un authentique altermondialiste. Dans le privé, un homme à l'humour ravageur que je n'ai jamais entendu proférer une parole raciste », constate Lipietz qui l'a côtoyé en Amérique du Sud lors d'une mission du Parlement européen.

Il fut le responsable de l'éclatement du FN, ennemi juré et déclaré de Bruno Megret qui ne se privait pas de l'appeller "Martinez l'arabe"; il dit un jour à un journaliste qui les confondaient:
" non Monsieur, Megret il est beaucoup plus facho et petit que moi".
Il fut le procureur général du procés de Megret lors d'un houleux bureau politique entrainant la scission et le départ du fondateur du MNR et de ses amis.

Sa première apparition télévisuelle au cours d'un mémorable duel sur la défunte Cinq contre Arlette Laguillier est resté dans les annales des bétisiers: il y déclarait sa flamme à l'égérie de Lutte Ouvrière outrée et rouge comme une pivoine, lui demandant de l'embrasser et de le rejoindre pour faire la révolution ensemble.

Génial ou illuminé ? Jean-Marie Le Pen apprécie ses fulgurances. D'autres frontistes le jugent fêlé. Martinez, lui, se voit visionnaire. Il pense que le FN doit faire sa révolution culturelle pour attirer les électeurs de gauche qui ont voté non au référendum sur l'Europe par refus de la mondialisation libérale.

Le volcanique Sétois s'inspire du jésuite Teilhard de Chardin pour avancer l'idée de planétisation, version martineziste de la mondialisation. « Nous devons penser l'humanité comme une entité. Avec internet, les portables, la grippe aviaire ou le réchauffement climatique, on voit bien que ce qui se passe ailleurs nous concerne aussi. Il faut changer de paradigme. Le grand défi du XXIe siècle sera de bâtir le monde » déclarait-il récemment sur le site E-deo. Il s'affirme ouvretement plus proche de José Bové que de Bruno Gollnisch qui est devenu depuis son meilleur ennemi...

Le penseur du FN avance l'idée d'un « quadrilatère de l'humanité » qui serait la gestion partagée « des parties communes de la copropriété planétaire : l'eau, les médicaments, l'alimentation et l'éducation ». Une sorte de gouvernance mondiale « pour installer de façon harmonieuse sur la planète les hôpitaux, les universités, les écoles ou les maisons de retraite ».

De cette ébouriffante mise en orbite, les retombées politiques semblent modestes. Jean-Claude Martinez n'est-il qu'un électron libre ? Certes, l'intervention de Le Pen au salon de l'agriculture, annonçant « le matin des paysans », portait sa marque. Certes, le discours du même à Valmy en septembre faisait coucou à la gauche républicaine. Certes, la campagne d'affichage du FN a surpris en montrant une jeune Black en jean taille basse.

Voici pour les bulles. Pour le dur, rien n'a changé. Concurrencé sur ses thèmes favoris (l'autorité, l'identité nationale) par Sarko et Ségo, Le Pen martèle les fondamentaux frontistes : immigration zéro et préférence nationale.

A titre personnel, Martinez, militant du vivant, se dit hostile à la peine de mort : le FN veut la rétablir pour les crimes les plus graves. Martinez pense que l'euro est une réalité incontournable : le FN reviendrait au franc en cas de crise. Martinez parle de politique planétaire : le FN en appelle aux nations.

En revanche, le sherpa lepéniste triomphe sur un point à ses yeux capital, celui des droits de douane déductibles, un système tout droit sorti de son brillant cerveau et repris dans le programme frontiste.

Son auteur affirme que cette invention pourrait sauver la planète en équilibrant les échanges mondiaux et mériterait le Nobel d'économie. Ce serait plus prestigieux que le prix de l'humour politique.